Le suivi climatique implique un travail sur des données multiples, qui peuvent être d’autant plus parcellaires que l’on remonte dans le temps de l’histoire humaine et planétaire. Ce séminaire se propose de discuter de la question de la quête et de la manipulation de ces données, et de l’appliquer à des anomalies climatiques de nature et de temporalités très différentes à partir de la période actuelle.

Intervenants

Marco Cosentino Lagomarsino (physicien, IFOM Istituto Fondazione di Oncologia Molecolare ETS, Milano)

On data literacy and climate change

This talk focuses on the tools required to navigate our contemporary “era of data”. I will argue that such tools are important for all, with an emphasis towards reading the data with care and proposing interpretations constructively, drawing conclusions while being aware of possible caveats, biases and limitations inherent in the analysis. The case of modern-day climate change is a crucial example, in a perspective of raised awareness, critical evaluation of information, informed decision-making, holding governments and organizations accountable for their practices and advocacy of evidence-based policies

Myriam Khodri (climatologue, Laboratoire d’océanographie et du climat)

Comprendre les causes des changements climatiques des derniers millénaires : un défi de taille

Si le réchauffement global récent a été attribué sans ambiguïté aux facteurs anthropiques, on ignore toujours dans quelle mesure les anomalies climatiques décennales à séculaires de grandes ampleurs observées au cours des derniers millénaires peuvent être attribuées à la variabilité climatique interne générée par les interactions spontanées entre ses composants, ou à l’impact des forçages externes. Pour répondre à cette question il est nécessaire de disposer de séries climatiques suffisamment longues et échantillonnant l’ensemble du globe. Or pour la période précédant la fin du dix-neuvième siècle, nous disposons de très peu de mesures directes ou d’indicateurs climatiques fiables. La phase de compréhension doit donc passer, d’une part, par des approches diagnostiques mettant en jeu certains concepts représentant la complexité du système climatique et, d’autre part, la théorie appliquée à des problèmes de grandes dimensions mais sous contrains par les observations disponibles, tout en appréhendant les différentes échelles spatiales et temporelles et les incertitudes. Cet exposé présentera les avancées récentes faites dans ce domaine qui permettent aujourd’hui d’entrevoir le spectre et les mécanismes de la variabilité interne qui restent encore très largement inexplorés.

Gilles Ramstein (climatologue, Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement, UMR 8212)

Plonger dans le passé profond, c’est aussi se confronter à la raréfaction des données

Dès qu’on sort du Quaternaire, c’est-à-dire il y a 2,6 millions d’années et qu’on s’intéresse au climat plus lointain de la terre, les indicateurs climatiques se raréfient. Pourtant, il y a d’importantes réorganisations climatiques qui se sont produites dans des périodes plus éloignées. Quelles sont ces données ? Comment les paléoclimatologues et les experts des données travaillent ensemble pour élaborer des scénarios quantitatifs ? Cet exposé se limitera à 3 périodes de bouleversement climatique : la période du Miocène moyen (15 millions d’années), où le taux de CO2 est similaire à celui qu’on attend pour la fin du siècle ; le dévonien, et l’extension de la biosphère terrestre, autour de 375 Ma. ; enfin, encore plus loin dans le temps, les épisodes de Terre englacée (« snowball Earth », 717-635 Ma). À chaque fois, le Graal consiste à établir des scénarios cohérents avec des données disparates et très diversifiées.

Débat final animé par Pascal David (physicien, Université Paris Cité, LIED) et Catherine Villard (bio-physicienne, CNRS, LIED)