Laboratoire interdisciplinaire des énergies de demain

La valeur de la terre

Les sciences sociales ont longtemps regardé le foncier – notamment le foncier agricole – comme un aspect crucial à partir duquel penser l’organisation de la production, les mécanismes de partage de la richesse et les rapports de domination dans les espaces ruraux. La terre était alors une ressource dont les divers usages faisaient régulièrement l’objet de négociation et un patrimoine qui se transmettait d’une génération à l’autre. Ainsi, dans les sources et les enquêtes, elle apparaissait avant tout sous sa valeur économique et symbolique, même si les conditions de sa fertilité étaient bien connues par les contemporains qui savaient en lire les signes. Si les alertes n’ont pas manqué, au XXe siècle surtout, la terre s’est trouvée réduite à un simple support que l’agriculture industrielle imaginait pouvoir maîtriser, au moyen d’innovations techniques, chimiques et biologiques. Mis au second plan dans un monde qui promettait de s’émanciper des contraintes matérielles, la réflexion sur cette valeur revient aujourd’hui sur le devant de la scène portée par l’urgence de phénomènes tels l’accaparement foncier, l’artificialisation des paysages ou la dégradation des sols sous l’effet du changement climatique. Un regard interdisciplinaire est désormais nécessaire pour interroger la valeur des terres dans toute sa complexité aussi bien socio-économique que biologique.

 

 

Céline Pessis (historienne, AgroParisTech)

La vie des sols durant les « Trente Glorieuses » : savoirs, ignorance et mobilisations socio-environnementales

Comment la vie des sols fut-elle invisibilisée dans les savoirs et les pratiques agricoles au sortir de la Seconde Guerre mondiale ? Quels acteurs, quelles disciplines scientifiques, quelles politiques tentèrent de lutter contre cet oubli de la dimension organique et vivante des sols ?  Cette intervention propose un cheminement historique aux côtés des microbiologistes, des agriculteurs, des médecins, protecteurs de la nature, hygiénistes, voire aménageurs, qui s’élevèrent pour la protection et la reconnaissance de la vie des sols durant la période des dites « Trente Glorieuses ». À travers l’étude des difficultés rencontrées, de la marginalisation de ces acteurs et de leurs savoirs, elle entend alimenter une réflexion sur la faiblesse de notre outillage conceptuel et pratique actuel.

 

 Battle Karimi (biologiste, Novasol Experts)

L’écologie microbienne des sols, de la production de connaissances au diagnostic opérationnel de la qualité des sols

Les sols constituent la 3ème frontière biotique. Ils abritent environ 15 tonnes d’organismes vivants à l’hectare dont 1/3 sont des microorganismes. Malgré l’implication centrale de ce patrimoine biologique dans le fonctionnement des sols et les services écosystémiques qui en découlent, il souffrait d’un manque important de connaissances jusque dans les années 2000. A cette période, la mise en place d’un programme de suivi de la qualité des sols de France – le Réseau de Mesures de la Qualité des Sols – et le développement des méthodes de biologie moléculaire ont permis d’intensifier les recherches sur les microorganismes du sol à grande échelle. De nombreuses connaissances sur l’écologie des microorganismes du sol ont alors été produites telles que leur distribution spatiale, les facteurs qui déterminent ces distributions et la hiérarchie des filtres environnementaux. L’ensemble de ces connaissances ont permis de produire un atlas français des bactéries du sol, ouvrage naturaliste à destination du grand public. Elles ont également permis de construire des bioindicateurs de la qualité écologique des sols et des référentiels nationaux d’interprétation qui sont désormais déployés et utilisés au terrain pour évaluer l’impact des usages et des pratiques de gestion des sols. Ces outils de diagnostic opérationnel constituent une innovation mobilisée pour apprécier la durabilité environnementale des activités humaines.

 

 Adrien Baysse-Lainé (géographe, CNRS, UMR5194 – PACTE)

Qualité des sols et réglementation foncière agricole en France

Depuis une décennie, la concentration foncière a été réinscrite à l’agenda social et politique français, notamment à l’occasion d’appropriations massives de terres par des acteurs non-agricoles. L’horizon d’une réforme foncière nationale anime de nombreuses organisations des secteurs agricole, juridique, de l’environnement et de l’action publique. À l’inverse de ce qu’ont promu deux principaux réseaux d’acteurs proches de la gauche paysanne, les débats et réalisations se sont jusqu’à présent développés en séparant les enjeux de partage du foncier (contrôle des marchés, mise à jour du bail rural, fiscalité) et de protection fonctionnelle des sols (artificialisation). Toutefois, à une échelle plus locale, mais de façon relativement silencieuse, une réglementation foncière (encadrement des fermages) établit depuis des décennies une corrélation entre qualité des sols et valeur de la terre, selon des modalités spatialement très variables qui révèlent des conceptions situées du foncier agricole.

 

Débat final animé par Roselyne Ferrari (biologiste, LIED, Université Paris Cité) et Niccolò Mignemi (historien, CNRS, LIED)

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